Vous avez dit droits d’auteur ?
Toujours largement méconnue au Grand-Duché de Luxembourg, la base légale des droits d’auteur est constituée par la loi du 18 avril 2001 sur les droits d’auteur, les droits voisins et les bases de données, telle que modifiée par la suite.
Pour faire simple, on fait la distinction entre le droit primaire et le droit secondaire. Lorsqu’une personne achète un livre à la librairie ou un journal en kiosque, cette acquisition lui donne le droit de lire ce livre ou encore ce journal. On parle du droit primaire. Or, cette acquisition ne permet pas de reproduire ce contenu, ni sur papier, ni de manière numérique. La reproduction sous toute forme relève du droit secondaire.
Pour faire plus tordu, les développements technologiques des deux dernières décennies n’ont pas aidé à clarifier la situation ni à faciliter l’identification des reproductions. Car les reproductions numériques via Internet, intranet, cloud… sont également des reproductions soumises à la loi. Malheureusement, notre manière de consommer (et aussi de copier et de télécharger) les informations sur Internet, en général, et les réseaux sociaux, en particulier, nous fait souvent oublier que tous les contenus ne sont pas toujours libres de droits et qu’en conséquence toutes les informations ne sont pas gratuites.
Malgré le fait que la loi sur les droits d’auteur est en vigueur depuis presque 25 ans, force est de constater qu’il faut encore beaucoup de sensibilisation par rapport au sujet auprès des utilisateurs de contenu protégé afin de leur faire comprendre que les créateurs de ce contenu protégé vivent de leur activité et ont un droit de percevoir une rémunération équitable. Ne pas accorder ou encore garantir cette rémunération équitable aux ayants droit aura comme conséquence que la culture et la promotion de la culture vont disparaître de nos sociétés.
luxorr : pour la presse, les livres et la photographie
C’est à ce niveau qu’interviennent les organismes de gestion collective (OGC) de droits d’auteur qui existent dans presque tous les pays du monde et qui font le lien entre leurs membres ayants droit (auteurs, éditeurs, etc.) d’un côté et des utilisateurs de contenus protégés via l’octroi de licences de l’autre côté. Car la loi est claire à ce sujet en précisant que toute reproduction par un utilisateur (à quelques exceptions près) implique une rémunération équitable à l’ayant droit.
Au Grand-Duché de Luxembourg, luxorr est un OGC représentatif constitué en 2003 sous forme d’association sans but lucratif. luxorr est composé de membres qui sont actifs dans le monde de la presse, des livres et de la photographie. Il existe deux autres organismes, la SACEM pour la musique et l’ALGOA pour l’audiovisuel.
Dans la pratique, luxorr délivre des licences aux utilisateurs d’œuvres protégées inscrites dans son répertoire et encaisse les redevances y relatives. Ces montants sont ensuite, après déduction des frais administratifs et de la promotion culturelle, distribués annuellement à ses membres.
Contrairement à ce que peut être la pratique dans d’autres pays, comme la France par exemple, le législateur luxembourgeois n’a pas prévu la « licence légale » dans le secteur professionnel. En d’autres termes, les sociétés de capitaux et les professions libérales ne sont pas dans l’obligation de contracter d’office une licence avec luxorr. Ceci malgré le fait que ces entités disposent toutes d’outils qui permettent la reproduction sous toute forme de contenus protégés (c’est-à-dire photocopieurs, imprimantes, scanners, ordinateurs, tablettes, smartphones, mémoires USB…). En conséquence, les discussions pour sensibiliser ces entités au besoin d’une licence qui les protège en cas d’une infraction deviennent âpres.
La seule licence légale qui existe est celle qui vise le monde des bibliothèques publiques. Dans le cadre du règlement grand-ducal du 8 janvier 2007 relatif à la rémunération équitable pour prêt public, toute bibliothèque publique déclare et s’acquitte envers luxorr par rapport au nombre d’usagers qui empruntent au moins une fois pendant l’année civile. De surcroît, la Bibliothèque nationale du Luxembourg (BnL) et luxorr ont signé en date du 26 novembre 2024 une convention qui a pour objectif de définir les obligations réciproques des parties dans le cadre de la directive 2019-790 dite « CDSM » (Copyright in a Single Digital Market) transposée au Luxembourg par la loi du 1er avril 2022 et qui permet à la BnL la mise en ligne d’œuvres « indisponibles dans le commerce ».
Des droits d’auteur à respecter partout dans le monde
luxorr est également membre de l’IFRRO (International Federation of Reproduction Rights Organisations). Cette année, nous avions l’honneur d’accueillir au Kirchberg le congrès semi-annuel 2025 de cette dernière. Dans le cadre de cet événement, qui s’est tenu pendant 3 jours au cours du mois de mai, non moins de 130 délégués représentant leurs organismes respectifs à travers le monde ont participé aux nombreuses sessions et groupes de travail qui traitaient des derniers développements en matière de droits d’auteur au niveau mondial.
Lors d’une session particulière relative aux litiges en matière de droits d’auteur traités par la Cour de Justice de l’Union Européenne (CJUE), Monsieur Maciej Szpunar (1er avocat général de la CJUE) a également tenu un discours afin de souligner le besoin de disposer de lois et règlements clairs afin que ces droits soient respectés dans un monde où les technologies permettant les reproductions de contenus protégés évoluent rapidement.
Un autre sujet qui domine largement les débats au sein de l’IFRRO depuis un moment est celui de l’intelligence artificielle (IA). Si au niveau européen, le EU AI Act est en vigueur depuis 2024, le AI Code of Practice (CoP) en est à sa 3e version avant d’entrer en vigueur en automne 2025. Si cette réglementation européenne a pour objectif de créer un environnement respectueux des droits d’auteur, les différentes versions du CoP tendent à diluer le cadre sur le plan du respect des droits d’auteur et sur le plan de la transparence. Entretemps, cette situation fait l’objet d’un appel commun à la Commission européenne d’une large coalition d’organismes actifs dans la défense des droits d’auteur (dont l’IFRRO) afin de revisiter les dispositions de l’article 53 et de protéger ces droits face à l’IA générative.
Pour plus d’informations, nous invitons toute personne intéressée à consulter notre site www.luxorr.lu ou encore de venir nous rencontrer les 15 et 16 novembre 2025 à notre stand lors des Walfer Bicherdeeg.