numero74

La loi du 23 juillet 2015 portant modification du Code du travail et du Code de la sécurité sociale concernant le dispositif du reclassement interne et externe a été publiée au Mémorial le 27 juillet 2015. La loi n’entrera toutefois en vigueur qu’au 1er janvier 2016.

Cette nouvelle loi apporte un certain nombre de modifications au système de reclassement actuellement en vigueur, dont voici les points qui intéressent plus particulièrement les employeurs.

Une accélération de la procédure de reclassement

La voie classique de saisine de la Commission mixte par le Contrôle médical de la sécurité sociale est maintenue quasiment en l’état. Seuls quelques petits ajustements ont été introduits pour tenter d’accélérer la procédure, tels que, par exemple, la saisine simultanée de la Commission mixte et du médecin du travail, alors que jusqu’à présent, c’était la Commission mixte qui, une fois saisie par le Contrôle médical de la sécurité sociale, saisissait le médecin du travail. Dans ce cadre, l’employeur sera, comme actuellement, informé par le Contrôle médical de la sécurité sociale de la saisine de la Commission mixte.

Une nouvelle voie d’accès au reclassement en cas de poste à risques

Une nouvelle voie de saisine de la Commission mixte a en sus été introduite par le législateur. Ainsi, dans le cadre d’examens médicaux effectués par le médecin du travail (le cas échéant à la demande de l’employeur ou du salarié), celui-ci devra dans certains cas ou pourra dans d’autres cas saisir la Commission mixte qui décidera d’admettre ou de refuser le reclassement interne.

Il y a lieu de distinguer deux situations quant à l’obligation ou la possibilité pour le médecin du travail de saisir la Commission mixte :


  • pour les entreprises occupant au moins 25 salariés et lorsque le salarié concerné a une ancienneté de 10 ans dans l’entreprise et occupe un poste à risques pour lequel il est déclaré inapte, le médecin du travail doit saisir la Commission mixte
  • pour les entreprises occupant moins de 25 salariés et lorsque le salarié concerné a une ancienneté de 10 ans dans l’entreprise et occupe un poste à risques pour lequel il est déclaré inapte, le médecin du travail peut, en accord avec le salarié et l’employeur, saisir la Commission mixte.
L’obligation de reclassement de l’employeur est renforcée par la suppression des quotas. Ainsi, un employeur ne pourra pas se retrancher derrière le respect d’un certain quota de salariés reclassés ou handicapés pour ne pas respecter une décision de reclassement interne.

Un élargissement du cercle des entreprises éligibles pour le reclassement interne et renforcement de la taxe compensatoire prévue en tant que sanction 

L’employeur a désormais l'obligation de reclasser en interne un salarié déclaré inapte pour son poste de travail dès qu’il occupe au moins 25 salariés (et non plus « plus de 25 salariés »).

Parallèlement, la taxe compensatoire, à charge de l’employeur qui refuse de reclasser un salarié en interne, bien qu’il y ait été obligé par une décision de la Commission mixte, est renforcée. Jusqu’à présent, l’employeur pouvait au maximum se voir infliger une taxe s’élevant à un montant équivalent à 50 % du salaire social minimum pour une durée maximale de 24 mois. Désormais, la taxe est augmentée et correspond au revenu mensuel moyen cotisable au titre de l’assurance pension du salarié concerné au cours des 12 mois de calendrier précédant la décision de reclassement interne. Cette taxe sera à verser aussi longtemps que l’employeur ne respecte pas l’obligation de reclassement interne avec un plafond de 24 mois également.

L’importance du certificat d’aptitude au poste de travail

Pour les salariés engagés depuis moins de 3 ans, le certificat d'aptitude devient une condition d'ouverture au reclassement. Le certificat d’aptitude est celui qui est établi par le médecin du travail au moment de l’examen médical d’embauche. Un tel salarié ayant une ancienneté de moins de 3 ans n’est éligible pour un éventuel reclassement que s’il est en possession du certificat d’aptitude en question, qui est par ailleurs transmis à la Commission mixte. Ce certificat aura dès lors une valeur probante significative, d'où l'importance de l’examen médical d’embauche.

Pour rappel, les employeurs doivent organiser un examen médical d’embauche sous peine de sanctions pénales. L’examen médical d’embauche doit être effectué, pour les postes à risques et pour les salariés travaillant de nuit, avant le prise d’effet du contrat de travail, et pour les autres salariés endéans les deux mois de la prise d’effet du contrat de travail;

La suppression de la prise en compte des quotas

L’obligation de reclassement de l’employeur est renforcée par la suppression des quotas. Ainsi, un employeur ne pourra pas se retrancher derrière le respect d’un certain quota de salariés reclassés ou handicapés pour ne pas respecter une décision de reclassement interne.

Par ailleurs, la nouvelle loi supprime la prise en compte des salariés reclassés dans le quota des travailleurs handicapés. Ainsi, l'employeur est obligé d'engager le nombre des salariés handicapés légalement requis en faisant abstraction des bénéficiaires d'un reclassement.

Le rôle renforcé du médecin du travail

Le texte prévoit qu'en cas de reclassement interne, l’aptitude au nouveau poste doit être constatée par le médecin du travail compétent.

A l’avenir, le médecin du travail devra obligatoirement procéder à des réévaluations

M. Gabrielle Eynard - Senior Associate Alen & Overy
M. Gabrielle Eynard - Senior Associate Alen & Overy

médicales périodiques de la situation du salarié reclassé. Dans ce cadre, le salarié reclassé en interne doit se soumettre à une réévaluation périodique au moins tous les deux ans, sauf si le médecin du travail estime qu’une périodicité plus courte s’impose ou s’il constate que la capacité de travail résiduelle du salarié n’est pas évolutive et a un caractère définitif.

Si dans le cadre de ces réévaluations périodiques, le médecin du travail constate que l’état de santé du salarié a évolué, il saisit la Commission mixte qui peut, selon le cas, décider des modalités d’aménagement du poste de travail ou d’une réduction de la durée du travail en cas de dégradation de l’état de santé, ou d’une perte du statut de salarié, ou d’une augmentation de la durée de travail en cas d’amélioration.

Maurice Macchin - Associate Allen & Overy
Maurice Macchi - Associate Allen & Overy

Le rôle de la délégation du personnel

Enfin, la loi du 23 juillet 2015 sur la réforme du dialogue social a étendu les attributions de la délégation du personnel en matière d'information et de consultation à la mise en œuvre des reclassements internes. Pour rappel, cette loi, en ce qui concerne cet aspect, n’entrera également en vigueur qu’au 1er janvier 2016.