Le contrat de travail comporte souvent une clause d’essai. Celle-ci a pour objet de permettre tant à l’employeur qu’au salarié d’apprécier les conditions de la mission à réaliser, les compétences du salarié et de vérifier que tout correspond bien aux attentes de chacune des parties. En conséquence, durant la période d’essai chacune des parties peut librement mettre un terme au contrat, sous réserve de respecter un préavis, sans avoir à en préciser les motifs (1).

Néanmoins, en précisant que l’article L.121-6 du Code du travail est applicable au contrat à l’essai, le législateur a entendu protéger le salarié, dès le début de la relation de travail, en cas de maladie. Ainsi, le licenciement ne peut être notifié au salarié en période de maladie, sous réserve que les conditions de la protection soient remplies et ce, même en période d’essai.

La question est alors de savoir comment se combinent ces dispositions lorsque le salarié, en période d’essai (rupture du contrat possible sans motif), est en maladie (protection contre la rupture du contrat). La question est importante car si la rupture n’est pas effective avant le terme de l’essai (et le préavis intégralement exécuté pendant l’essai), le contrat se poursuivra jusqu’à son terme (CDD) ou sera réputé conclu à durée indéterminée depuis l’origine (CDI).

C’est pourquoi, l’article L.121-5 du Code du travail dispose qu’« en cas de suspension de l’exécution du contrat pendant la période d’essai, cette période est prolongée d’une durée égale à celle de la suspension, sans que la prolongation de l’essai ne puisse excéder un mois ». Les périodes de maladie seront donc comptabilisées, dans la limite d’un mois, pour être ajoutées à la durée de l’essai. Il est important alors de préciser que cette prolongation court à partir de la date d'expiration de l’essai telle que prévue au contrat et non à partir de la reprise du travail par le salarié (2).

Imaginons la situation suivante…

Un salarié a signé un contrat avec une clause d’essai de 6 mois allant du 1er décembre 2013 au 31 mai 2014 avec mention d’un préavis d’un mois en cas de rupture pendant le préavis (3). Dans ce cas, pour qu’il y ait rupture pendant la période d’essai, celle-ci devra être notifiée le 30 avril au plus tard et le préavis exécuté au mois de mai.

Imaginons que ce salarié a été malade du 1er février au 31 mars 2014, soit 2 mois. La période d’essai sera alors prolongée d’un mois (durée maximale), soit jusqu’au 30 juin 2014. Pour qu’il y ait rupture pendant la période d’essai, celle-ci devra être notifiée au plus tard le 31 mai 2014 et le préavis exécuté au mois de juin.

Imaginons que ce salarié est encore malade du 15 mai au 15 juin 2014. Une application stricte de l’article L.121-6 du code du travail pourrait interdire à l’employeur de notifier la rupture pendant cette seconde période de maladie. Le contrat pourrait devenir définitif alors qu’une rupture notifiée le 1er jour de reprise, soit le 16 juin 2014, avec un préavis d’un mois porterait les parties au-delà de la période d’essai prolongée qui s’achève le 30 juin 2014. En pareille circonstance, les tribunaux luxembourgeois retiennent cependant une tout autre analyse. En raison de la nature particulière du contrat à l’essai, que les parties peuvent librement résilier, et qui est strictement limité dans le temps, l’employeur, en cas de maladie de son salarié, recouvre, à l’échéance de la période d’essai prolongée, le droit de notifier au salarié dans les formes et délais légaux qu’il entend dénoncer le contrat à l’essai pour empêcher que celui-ci ne se transforme en contrat à durée indéterminée (4) et ce, même si son salarié est toujours en incapacité de travail (5). Dans notre exemple, l’employeur pourra (et devra) notifier la rupture le 31 mai au plus tard, même si le salarié est malade.

C’est donc le mécanisme de l’essai qui prévaudra sur la protection en cas de la maladie. Attention toutefois aux calculs. Le tribunal du travail a ainsi déclaré un licenciement abusif car intervenu en période de maladie alors que la durée de l’essai restant à courir permettait à l’employeur de notifier la rupture après le retour du salarié… à un jour près (6).

 

Céline Lelièvre
Associée
DCL Avocats

(1) Pendant les deux premières semaines de l'essai, le contrat de travail ne peut pas être rompu, sauf en cas de faute grave commise par le salarié ou par l'employeur. La sanction du non-respect de cette interdiction légale donne lieu à l'octroi par le tribunal d'une indemnité compensatoire de préavis. Au-delà de ces deux semaines, il peut être rompu par lettre recommandée ou par signature apposée sur le double de la lettre de résiliation.
(2) Arrêt de la Cour d'Appel du 15/01/2004, rôle n° 27449 ; Arrêt de la Cour d'appel du 30/09/2009, rôle n° 33428.
(3) Le préavis légal pour une période d’essai de 6 mois est de 24 jours. Une durée dérogatoire de 1 mois a été choisie pour faciliter la compréhension de l’exemple.
(4) Arrêt de la Cour d'appel du 30/09/2009, rôle n° 33438.
(5) Arrêt de la Cour d'appel du 04/05/2006, rôle n° 29896.
(6) Jugement du tribunal du travail du 25/10/2013, rôle n° 3910/2013.