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Coluche a dit : « Avec la retraite, les mecs ont assez de fric pour vivre peinards jusqu'à la fin de leurs jours. Sauf évidemment s'ils veulent acheter quelque chose ». Et pour vous, cette citation sera-t-elle plutôt vraie ou plutôt fausse?

pension

N’attendez pas d’être à la retraite pour le savoir et constituez dès à présent votre «menu» pension en vous servant des mets proposés.

Dans tout « menu pension », il peut y avoir trois plats différents :

1. la pension légale ou 1er pilier: c’est la pension que l’Etat vous versera lorsque vous remplirez les conditions d’ouverture du droit à la pension;

2. la pension extra-légale ou 2e pilier: c’est la pension qui résulte de régimes complémentaires de pension à l’initiative de vos différents employeurs;

3. la pension personnelle ou 3e pilier: C’est votre épargne personnelle, celle qui résulte de votre propre initiative sans intervention de vos employeurs.

La pension légale ou 1er pilier

C’est un aliment de base, en quantité de plus en plus en plus limitée. S’il n’y a que ça dans votre assiette, vous courez à la carence alimentaire certaine!

L’origine de la pension légale en Europe remonte au XIXe siècle. Elle verra son développement battre son plein au XXe siècle avec l’allongement de l’espérance de vie.

Pour la financer, les économistes et actuaires de l’époque imaginèrent deux systèmes : le système de financement par capitalisation collective et le système de financement par répartition.

Dans un système de retraite par capitalisation collective, la pension du retraité est normalement proportionnelle à ce qu’il a cotisé pendant sa vie active. Si un tel système exista par le passé, il fut abandonné et notamment à cause des dépréciations monétaires intervenues entre 1910 et 1918.

Aujourd’hui, au Grand-Duché de Luxembourg, tout comme en France, en Allemagne, ou encore en Belgique, le régime des pensions légales repose sur un système de répartition : ce sont les cotisations sociales générées par la population active qui financent les pensions en cours versées à la population retraitée. Il n’y a donc pas de parallélisme direct entre ce que le pensionné a cotisé pendant sa vie active et le montant de pension qu’il perçoit.

Un tel système de répartition, puisque basé sur une démographie future non maîtrisée, ne peut qu’être voué à l’échec. Force est de constater le déséquilibre entre les populations active et retraitée actuelles. La masse des retraités toujours grandissante et l’espérance de vie toujours plus longue ne sont pas compensées par une population active suffisante. L’épuisement des caisses de pension est donc inévitable. Sans mesures gouvernementales adaptées, la pension légale pourrait tendre vers zéro. La mise en place d’un système conjoint de financement par capitalisation pourrait éviter une catastrophe.

La pension extra-légale ou 2e pilier
C’est un aliment complémentaire certain qui peut éviter la disette à ceux qui en bénéficient.

Les régimes complémentaires, obligatoires et/ou volontaires ont été créés à l’après-guerre pour venir à la rescousse de la pension d’Etat.

En France, l’AGIRC (Assurance Générale des Institutions de Retraite des Cadres), régime complémentaire obligatoire, voit le jour en 1947 suite à un accord avec les partenaires sociaux. L’accord interprofessionnel créant l’ARRCO (Association pour le Régime de Retraite Complémentaire des Salariés) est quant à lui signé en 1961.

En Belgique, les premiers régimes complémentaires de pension volontaires datent du début des années 1970. Les régimes de pension sectoriels obligatoires n’apparaîtront que dans le courant des années 90.

Le 2e pilier pour les salariés se développe au Grand-Duché de Luxembourg à la même époque et la loi qui en fixe le cadre sortira en juin 1999. Un projet de loi permettant l’accès au 2e pilier pour les indépendants et professions libérales est en cours de préparation aussi bien en Belgique qu’au Grand-Duché de Luxembourg.

Tous ces régimes complémentaires de pension, mis en place à l’initiative d’employeurs, tendent à venir compléter la pension légale puisque celle-ci ne constitue pas, dans la majorité des cas, un revenu de remplacement acceptable, notamment pour les cadres et dirigeants puisqu’établie à partir de revenus plafonnés.

Ces régimes de pension sont généralement financés par le biais d’assurances de groupe, de fonds de pension (qu’il soit local ou paneuropéen) ou encore en interne avec provision au bilan (système encore existant au Grand-Duché de Luxembourg). Le choix du véhicule de financement est en général lié à la taille et/ou stratégie de l’entreprise où ils sont mis en place.

Pour rendre ce 2e pilier attractif tant pour l’employeur que le salarié, de nom-breux incitants fiscaux sont mis en place. De manière générale, les coûts employeur engendrés par le régime de pension sont déduits au titre de charge d’exploitation. Les impôts et retenues sociales des contributions versées et/ou des prestations perçues à la retraite dépendent des législations en place dans les pays concernés et des conventions de prévention de la double imposition entre pays.

Ce sont les cotisations sociales générées par la population active qui financent les pensions en cours versées à la population retraitée. Il n’y a donc pas de parallélisme direct entre ce que le pensionné a cotisé pendant sa vie active et le montant de pension qu’il perçoit.

L’élaboration d’un bon « design » et le choix d’un bon « véhicule de finance-ment » pour le régime complémentaire de pension est donc essentiel. Un audit régulier du plan de pension a toute son importance.

La pension personnelle ou 3e pilier

Vous rajoutez vous-même un plat dans le menu pension (assurance vie indivi-duelle, épargne-pension…) parce que vous avez encore faim. Cet apport ré-sultant de votre propre initiative est hautement recommandé si vous n’avez qu’une confiance limitée dans la pen-sion de l’Etat (1er pilier) et/ou si vous ne pouvez compter sur la générosité d’un employeur (2e pilier).

Plus communément connu pour ses produits d’épargne-pension, le 3e pilier englobe non seulement des produits appelés épargne-pension, mais également les contrats d’assurance vie individuelle classiques, souscrits par un particulier à sa propre initiative.

Les produits épargne-pension, ouverts à tous, sont encouragés par les Etats par le biais d’incitants fiscaux, conscients de la faiblesse du 1er pilier et du non-accès pour tous au 2e pilier.

Les avantages fiscaux accordés pour ces contrats épargne-pension sont cependant relativement limités et exigent souvent du contrat d’épargne-pension qu’il réponde à certaines conditions parfois contraignantes sans exclure le fait que les règles fiscales peuvent parfois changer en cours de contrat.

Le contrat d’assurance vie classique, souscrit indépendamment d’incitants fis-caux, permet aussi la constitution d’une pension personnelle.

Le choix de l’assureur et du pays de souscription a toute son importance. Les coûts de constitution de votre « future pension personnelle » ainsi que la sécurité liée à la manière de l’investir ne doivent pas être négligés. Le Grand-Duché de Luxembourg dispose d’une législation et réglementation très protectrices en la matière.

Alors pour vous, cette citation de Coluche sera-t-elle plutôt vraie ou plutôt fausse ?

Lydia Chenoy  Actuaire, Head of Employee Benefits
Lydia ChenoyActuaire, Head of Employee Benefits

Reportez-vous à votre appétit :


  • vous n’avez qu’une petite faim, contentez-vous du plat du marché, la pension d’Etat (1er pilier);
  • Vous n’êtes pas rassasié, faites-vous servir si possible une entrée, la pension d’entreprise (2e pilier);
  • Vous êtes gourmand, offrez-vous un dessert et envisagez l’épargne individuelle la plus adaptée à votre situation (3e pilier)

Composer sa pension, c’est passer du menu régime au menu plaisir.