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Le nouveau règlement Bruxelles I bis

Depuis le 10 janvier 2015, le règlement (UE) n° 44/2001 sur la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale, dit Bruxelles I, a été remplacé par le règlement (UE) n° 1215/2012 du 12 décembre 2012 que certains ont d’ores et déjà renommé Bruxelles I bis.

L’objet de ces règlements est de préciser les compétences judiciaires des différents pays en cas de litiges transfrontaliers et les conditions dans lesquelles une décision, rendue par un Etat membre, pourra être reconnue et exécutée dans un autre Etat membre. En l’espèce, nous limiterons notre propos à la question de la reconnaissance et l’exécution des décisions.

Une des nouveautés de Bruxelles I bis réside dans la suppression de la procédure dite de l’exequatur (1).

Bruxelles I bis pose désormais comme principe non seulement que les « décisions rendues dans un Etat membre sont reconnues dans les autres Etats membres sans qu’il soit nécessaire de recourir à aucune procédure », mais également que toute « décision rendue dans un Etat membre et qui est exécutoire dans cet Etat membre jouit de la force exécutoire dans les autres Etats membres sans qu’une déclaration constatant la force exécutoire soit nécessaire ». Une décision rendue par un Etat membre de l’Union pourra désormais être exécutée dans un autre Etat membre sans avoir à subir la procédure d’exequatur qui apparaissait comme un frein ; elle bénéficiera de plein droit de la force exécutoire.

Ce nouveau cadre devrait faciliter la circulation des décisions en matière civile et commerciale (2). Dorénavant, la partie qui entend faire exécuter dans un Etat membre une décision rendue dans un autre Etat membre pourra directement procéder, sous réserve toutefois de posséder un certificat émanant de la juridiction d’origine qui atteste que ladite décision est bien exécutoire dans son pays d’origine (formulaire article 53).

Le refus est toujours possible

Mais si la reconnaissance et l’exécution des décisions étrangères sont devenues le principe, cette évolution ne s’est pas faite sans garde-fous. Ainsi, les articles 45 et 46 du règlement prévoient que tout intéressé peut demander à ce que la reconnaissance ou l’exécution d’une telle décision soit refusée. Tel sera notamment le cas si le fait de reconnaître ou d’exécuter la décision est manifestement contraire à l’ordre public, si la décision a été rendue par défaut alors que le défendeur n’a pas été en mesure de se défendre, si la décision est inconciliable avec une autre décision rendue entre les mêmes parties dans un litige ayant le même objet ou la même cause, ou, enfin, si la décision a été rendue par une juridiction qui n’aurait normalement pas dû être compétente au regard des règles de compétences attributives et exclusives posées par le règlement.

La demande de refus de reconnaissance ou de refus d’exécution sera portée devant le président du tribunal d’arrondissement siégeant comme en matière de référé. L’appel de sa décision sera porté devant la Cour d’appel siégeant comme en matière de référé (3).

Relevons que les mesures provisoires et conservatoires tombent également dans ce

Me Céline Lelièvre -  Associée DCL Avocats
Me Céline Lelièvre -Associée DCL Avocats

système de la reconnaissance et de l’exécution sans procédure complémentaire. Néanmoins, si ces mesures ont été accordées de manière unilatérale sans que le défendeur n’ait pu faire valoir une défense, la décision devra être notifiée ou signifiée avant de pouvoir être exécutée.

Notons pour conclure que le nouveau règlement n’est applicable qu’aux actions judiciaires intentées, aux actes authentiques dressés ou enregistrés formellement et aux transactions judiciaires approuvées ou conclues à compter du 10 janvier 2015. Pour les actes antérieurs, le règlement 44/2001 s’applique toujours et la procédure d’exequatur est toujours requise.

(1) Cette procédure avait pour objet de faire re-connaître les décisions rendues dans un Etat membre afin qu’elles puissent être exécutées dans un autre Etat.
(2) Certains domaines sont expressément exclus du champ d’application du règlement comme notamment les questions relatives à l’état et à la capacité des personnes, les faillites, la sécurité sociale, l’arbitrage, les obligations alimentaires, les testaments ou les successions.
(3) Communication du Luxembourg à la Commis-sion en date du 10 décembre 2014.