La médiation, l’arbitrage, la conciliation sont des modes alternatifs de gestion de conflits aujourd’hui connus. Ces procédés ont en commun un même objectif : trouver une solution qui convienne aux parties sans intervention de la machine judiciaire. Alors que des procédés existent déjà, à quoi sert ce dernier venu de la gestion amiable des conflits qu’est le droit collaboratif ? 

Ce mode alternatif de gestion des conflits est utilisé de longue date aux Etats-Unis et au Canada. Il se développe aujourd’hui de plus en plus en France, en Espagne, en Autriche ou en Suisse. Il est même désormais intégré dans le Code judiciaire belge. Ce processus spécifique a vocation à s’appliquer dans tous les systèmes juridiques et pour tous les litiges.

Le processus de droit collaboratif est aussi un mode extrajudiciaire de gestion des conflits. Mais là où le médiateur, le conciliateur ou l’arbitre sont tenus de conserver une distance et une neutralité vis-à-vis des parties, l’avocat qui participe à un processus collaborateur reste l’avocat d’une seule partie, qu’il accompagne et conseille dans la résolution du conflit. Le processus collaboratif, processus bien évidemment volontaire, repose donc avant tout sur un contrat, dit contrat de participation, entre au moins quatre intervenants : les parties et les avocats.

La négociation, seule issue

Par la signature du contrat de participation chaque partie accepte de rentrer dans un processus où la négociation devient le seul principe de résolution du litige et où toutes les problématiques qui existent entre les parties peuvent être librement abordées dans le respect de la plus stricte confidentialité. Afin d’asseoir ce cadre de la négociation, il est important de préciser qu’en cas d’échec du processus, les avocats devront renoncer à leur mandat. Ils ne peuvent participer à ce processus puis poursuivre dans une voie judiciaire ; et si une procédure est en cours, elle doit être suspendue.

Le but du processus est de permettre aux parties de trouver des solutions durables qui soient conformes à leurs intérêts et répondent à leurs besoins. Là où dans le cadre habituel de leurs fonctions les avocats s’opposent pour défendre les positions de leurs clients, les praticiens du droit collaboratif travaillent ensemble pour satisfaire leurs besoins. La pratique collaborative abandonne la négociation sur position au profit de solutions qui répondent aux besoins de chacun. Une condamnation pécuniaire (qui souvent ne peut même pas être exécutée), même si elle était l’objet de la demande judiciaire (= la position) ne satisfera en réalité pas la personne qui attendait la reconnaissance de la qualité de son travail (= le besoin).

Dans une procédure judiciaire, le juge examinera les faits (présents, passés, prouvés, supposés ou contestés) tels qu’ils auront été relatés par les avocats des parties. Il sera d’ailleurs limité au cadre de la procédure fixée par les parties. Dans un litige travail, on ne parle pas de bail… même si le salarié a dû louer un bien pour accepter le poste. Le juge appliquera des règles de droit, telles qu’exposées et interprétées par les avocats des parties pour finalement rendre une décision censée clore le litige. Les parties n’ont alors qu’un rôle de spectateurs et se verront imposer une solution qui, souvent, ne réjouit pas assez la partie qui « gagne » et est critiquée par la partie qui « perd ».

Trouver ensemble la solution

Dans le cadre d’un processus collaboratif, les parties sont remises au centre de leur litige. Les avocats ont alors pour mission, non plus d’opposer les positions de leurs clients mais d’identifier les besoins de chacun afin de trouver la meilleure solution pour tous. Les parties ne sont plus limitées dans le cadre de leur litige pour trouver LA solution mais peuvent faire preuve de plus de souplesse et d’imagination pour trouver LES solutions. Les parties pourront gérer, dans le même processus, la fin d’une relation de travail et ses conséquences sur un bail conclu pour pouvoir prendre le poste à l’origine.

Le contrat de participation oblige alors les parties et leurs avocats respectifs à négocier en toute transparence, en toute confidentialité et en toute bonne foi afin de trouver une solution qui convienne à tous. Les avocats deviennent les garants d’un processus. Les parties doivent collaborer de bonne foi en respectant les principes de sincérité, de transparence et de véracité. La confidentialité des informations échangées et des documents révélés doit être garantie également.

Dans ce cadre, les pièces sont d’ailleurs en général seulement montrées en séance et non remises à l’autre partie.

En conclusion

Là où une procédure judiciaire opposera pendant des années des parties dans un tribunal, où les avocats, se fondant sur les faits passés, tenteront de convaincre un juge pour obtenir de celui-ci une décision qui satisfera (au mieux) leur client, le processus collaboratif met ensemble des parties, conseillées par leurs avocats qui, en appréhendant le litige qui les oppose, vont négocier une solution globale en quelques mois, solution qui sera acceptée de tous et qui pourra être mise en place pour le futur.

Me Céline Lelièvre, Avocat à la Cour inscrite aux barreaux de Luxembourg (dcl avocats) et du canton de Vaud/Suisse (Etude Mercuris Avocats,Lausanne), médiateur affilié à la Fédération Suisse des Avocats, avocat en droit collaboratif
Me Céline Lelièvre, Avocat à la Cour inscrite aux barreaux de Luxembourg (dcl avocats) et du canton de Vaud/Suisse (Etude Mercuris Avocats,Lausanne), médiateur affilié à la Fédération Suisse des Avocats, avocat en droit collaboratif