La relation entre l’employé et son entreprise a connu une profonde mutation au fil des années, avec un clivage bouleversé par les effets de la crise financière. Dans de nombreuses entreprises, la fonction RH a été au-devant de la scène, avec pour objectif d’atténuer les tensions entre employés et employeur avant qu’elles n’aient de conséquences à long terme sur le fonctionnement de l’entreprise.

Pour de nombreux dirigeants d’entreprise, le rôle de la fonction RH se limite à la gestion quotidienne de l’administration du personnel et à l’amélioration des conditions de travail. Cette vision très restrictive démontre le manque d’intérêt pour la fonction RH qui peut jouer pourtant un rôle prépondérant dans le  processus de gestion des risques et de sauvegarde de l’intégrité d’une entreprise.

Il est important de noter que cette responsabilité incombant aux RH n’est pas une simple option. Elle constitue une véritable nécessité pour quiconque voudrait implémenter un système intégré et efficace de prévention, voire de sanctions si nécessaire.

La fonction RH et le recrutement

La démarche de recrutement se décompose en différentes étapes consécutives : identification des besoins de l’entreprise, description du poste à pourvoir, choix entre le recrutement interne ou externe, sélection des candidats potentiels, entretiens et, finalement, si concluant, l’embauche du candidat.

Si certains CV adoptent parfois un caractère mensonger, il faut cependant toujours garder à l’esprit que le contenu d’un CV est de nature contractuelle, tel que les diplômes ou l'expérience professionnelle. Par conséquent, si ce n’est pas coutume, un contrôle des diplômes présentés et une copie d’un extrait récent du casier judiciaire devraient être inclus dans tous processus de recrutement externe.

De même, pour les entreprises ayant des liens commerciaux avec certains pays, principalement les Etats-Unis, elles devraient normalement s’assurer d’une vérification systématique des candidats par rapport à certaines bases de données gouvernementales. Au demeurant, c’est de la responsabilité des RH de trouver une solution afin que ce contrôle soit compatible avec les diverses réglementations locales en matière de droit du travail.

La fonction RH et la formation 

L’employé de l’entreprise constitue la première cible d’agissements non éthiques. Les RH doivent ainsi identifier les besoins réels en formation pour couvrir certains risques : fraude, corruption, conflits d’intérêts, blanchiment d’argent, programmes de sanctions internationales, etc. Il faut noter qu’en cas de corruption, il arrive très souvent que les autorités gouvernementales examinent le degré de sensibilisation du personnel à cette problématique lors d’une enquête de corruption. Ainsi, le département RH doit pour cette raison montrer « patte blanche » en termes de suivi de formations et donc pouvoir démontrer sur ce point précis les efforts que l’entreprise a investis dans ce domaine pour se prémunir de toute action de corruption.

La fonction RH  et l’évaluation des personnes

Les RH devront incorporer dans le processus d’évaluation des performances de l’employé des critères liés à la bonne gestion des risques. Deux points sont particulièrement visés dans cette démarche :
  • la sauvegarde de l’entreprise en tant qu’employeur ;
  • la réduction des coûts : devoir rattraper les manquements d’un employé qui ne respecte pas les processus ou valeurs internes engendre un coût additionnel pour l’entreprise, en raison des efforts à consentir pour palier à ces manquements.
La fonction RH et le processus de whistleblowing

La mise en place et la gestion d’un processus de whistleblowing (lanceur d’alertes) est fondamentale, bien que souvent trop peu considérée.

Lors de la mise en place du processus de « prévention », la première question est de savoir si les RH doivent y participer. Pour certains, la question est tranchée et seul le département d’audit interne ou de compliance, ou dans certains cas le département légal interne, sera le maître d’œuvre exclusif de cette mise en place. Selon nous, exclure complètement les RH de cette implémentation ne constitue pas la meilleure option. En effet, en Europe, les aspects très importants de droit du travail, protection des données, accès aux informations du dossier du personnel sont fondamentaux et il convient de les incorporer dès le départ.

Concernant la gestion du filtrage, la fonction RH pourra là aussi apporter un soutien non négligeable.

Finalement, l’exploration des possibilités existantes et la mise en œuvre de la solution choisie par les RH dans une situation de protection du whistleblower et de la personne suspectée n’est pas à remettre en question. Comment gérer le whistleblower interne et le protéger d’éventuelles représailles ? Une enquête interne doit toujours être faite à charge, mais aussi à décharge. Selon la gravité des faits reprochés, laisser le suspect en poste n’est peut-être pas une option viable. Or, prendre des mesures radicales sans preuves solides à ce stade du processus engendre une violation de la présomption d’innocence et, par conséquent, des conséquences très néfastes si par après il est établi par l’enquête que les faits reprochés étaient sans fondements réels.

La fonction RH en cas de fraude ou autre comportement non éthique 

Par chance pour l’entreprise concernée, ces cas n’apparaissent normalement que de façon exceptionnelle, mais il est néanmoins indispensable que les RH aient réfléchi et mis en place des mesures et procédures adaptées à ce genre de situation.Voici quelques points à prendre en considération :
  • s’assurer que les mesures prises lors de l’enquête soient compatibles avec le droit du travail et les autres normes légales et réglementaires applicables ;
  • prévoir dans le contrat de travail et autres documents signés par chaque employé, les clauses adéquates afin de pouvoir au besoin effectuer, à charge ou à décharge, une recherche ciblée au niveau informatique ;
  • créer une procédure de sanctions adaptées à ce genre de situation ;
  • entamer une réflexion et mettre par la suite en œuvre une procédure spécifique concernant la communication et l’interaction éventuelle avec les syndicats et les administrations étatiques, en particulier dans le cadre de soupçons d’harcèlement moral ou physique.
En conclusion, bien que d’autres départements au sein d’une entreprise soient par nature garants de la pérennité de l’entreprise, le département RH peut et doit, lui aussi, apporter sa contribution, en aidant notamment à naviguer de façon sereine parmi les nombreuses normes régissant les relations de travail.

Gérard Zolt
Country Practice Leader du Département Fraud Investigation & Dispute Services

EY Luxembourg