Le CRP Henri Tudor accueille depuis peu la Chaire LaboRH en Management Humain et Transformations du Travail, antenne luxembourgeoise de la Chaire belge du même nom, créée dans le cadre d’un partenariat entre le Centre de Recherche publique luxembourgeois et l’Université Catholique de Louvain.

La gestion des Ressources humaines connaît en effet ces dernières décennies de profonds changements, informatisation des RH, individualisation des modèles de carrières versus performance collective, tensions intergénérationnelles, intensification des échanges internationaux, responsabilité sociale accrue des entreprises au regard de leur environnement socio-économique, flexibilité toujours plus grande du travail, développement du numérique. Concilier les intérêts de l’entreprise et ceux des salariés s’avère délicat pour les gestionnaires des Ressources humaines, peu ou mal armés, pour faire face aux transformations en cours. Plus que jamais, le contexte socio-économique qui se digitalise, lui aussi, exige de développer des compétences innovantes au sein de l’entreprise. Loin de toute improvisation, la réforme en cours du système managérial passera par la professionnalisation de la fonction RH. Faute de quoi les entreprises pourraient bien ne pas atteindre leurs objectifs de développement, menaçant par le fait leur survie.

Un centre de recherche appliquée

La Chaire LaboRH créée en 2011 en Belgique par l’ULC, et son antenne luxembourgeoise (2013), s’est donné pour mission de constituer un Observatoire de la fonction RH et de l’évolution du travail, en Belgique et au Luxembourg. Elle se veut un lieu de réflexion où est examiné, de manière durable, un management des Ressources humaines innovant et responsable. Elle cherche par ailleurs à favoriser le partage de connaissances entre les responsables du management des Ressources humaines dans les entreprises et les acteurs du monde académique et scientifique. Les thématiques de recherche sont sélectionnées conjointement par le personnel académique et scientifique, d’une part, et les praticiens de terrain, d’autre part. Une démarche originale qui la distingue d’une Chaire classique financée par le mécénat, laquelle ne s’inscrit pas en effet dans une logique de coconstruction des connaissances. La Chaire LaboRH peut ainsi s’appuyer sur les travaux et les résultats de la Recherche & Développement pour accompagner les entreprises luxembourgeoises dans leur processus de transformation vers l’économie digitale.

Une organisation collégiale

La Chaire LaboRH est organisée autour d’une équipe, le Comité scientifique, et dirigée par une personnalité scientifique reconnue et ayant une bonne connaissance du monde socio-économique qui développe pendant un à trois ans des activités de recherche, de formation initiale et de formation continue. Elle dispose en outre d’un Comité de pilotage, structure où sont représentés de manière collégiale les différents acteurs du projet de recherche sélectionné : responsables des Ressources humaines des entreprises partenaires et enseignants-chercheurs du Comité scientifique. C’est par conséquent un lieu où l’on discute et échange : le Comité est responsable du choix et de la définition des thématiques de recherche ; c’est aussi le lieu où se prennent des engagements comme celui pour les professionnels du management de concrétiser des propositions d’amélioration dans le domaine de la gestion des managers et des collaborateurs. Autrement dit, lorsque des décisions se prennent, elles ont au préalable fait l’objet d’un consensus, ce qui facilite ainsi par la suite leur mise en œuvre sur le terrain

Un modèle original qui associe acteurs du terrain et chercheurs

Au Luxembourg, explique Anne Rousseau, professeur à l’Université Catholique de Louvain et cotitulaire de la Chaire LaboRH, le projet pilote initié par la Chaire a associé trois partenaires : deux entreprises, EBRC (fournisseur de solutions ICT), Tarkett GDL (entreprise active dans le revêtement des sols) et le CRP Henri Tudor qui, sous la conduite d’Anne Rousseau, étudie les transformations des entreprises dans ce contexte d’économie numérique. Les travaux de recherche ont porté sur la thématique sélectionnée par les professionnels du management, en l’occurrence la distanciation au travail, une thématique qui correspond à leurs préoccupations. Après une phase d’investigation et d’approfondissement, des solutions types ont été modélisées, telles que des formations adéquates destinées aux managers ainsi que des modules de sensibilisation proposés aux collaborateurs selon un format convenu (ateliers, participation à un groupe de recherche, etc.). Ce partenariat, qui s’est déroulé sur une année, a reçu, indique Anne Rousseau, un bon accueil de la part des participants. Formations, conférences et séminaires sont par ailleurs proposées par l’UCL et le CRP Henri Tudor afin de permettre aux professionnels du management, impliqués dans ce projet, d’acquérir des connaissances et de développer les compétences appropriées.

En conclusion

Pour assurer leur croissance, les entreprises luxembourgeoises devront investir dans le capital immatériel, c'est-à-dire l’acquisition de connaissances dans le cadre d’un transfert et la cocréation de connaissances entre chercheurs et praticiens du terrain dans le domaine du management. Il est clair qu’il faudra du temps et des moyens pour y parvenir.

 

Martine Borderies