À l’heure où le réchauffement climatique commence à montrer ses effets pervers, beaucoup n’ont pas attendu pour s’intéresser aux investissements verts. Ophélie Mortier, Chief Sustainable Investment Officer chez Degroof Petercam Asset Management, nous en dit plus.

Qu’est-ce qu’un investissement durable et responsable ?

Ophélie Mortier, Chief Sustainable Investissement Officer, Degroof Petercam Asset Management.
Ophélie Mortier, Chief Sustainable Investissement Officer, Degroof Petercam Asset Management.

C’est un investissement qui va cibler des entreprises que nous avons sélectionnées sur base de critères environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG). Ce type d’investissement vise un horizon à moyen et long terme dans la durabilité. Concernant les entreprises, les critères ESG sont essentiels et incluent une analyse de ce qu’elles ont pu mettre en place pour accélérer leur transition environnementale. Par exemple, certaines grandes entreprises du secteur de l’énergie, même si elles ne sont pas encore vertueuses puisqu'elles exploitent encore des énergies fossiles, sont aussi des contributeurs majeurs du développement des énergies renouvelables et nous en tenons compte. Par contre, se trouvent sur notre liste noire toutes les entreprises des secteurs du tabac, de la production de charbon thermique ou de l’armement… Notre rôle n’est pas de dicter ce qui est bien ou mal, mais d’être un intermédiaire dans l’écosystème de la durabilité (Planet, People, Profit) et notamment d’échanger les meilleures pratiques sur les enjeux de durabilité.

Comment ces investissements sont-ils suivis, comment prouver qu’ils sont bien durables et responsables ?

Ces dernières années, de nombreuses réglementations ont déferlé en matière d’investissements verts. La Commission européenne a réagi avec la taxinomie, ce qui a permis à tous les acteurs de disposer d’un cadre réglementaire identique, transparent et qui nous aide à orienter les investissements vers les activités économiques les plus nécessaires à la transition écologique recensées par la Commission : l’adaptation au changement climatique, l’utilisation durable et la protection des ressources aquatiques et marines, la transition vers une économie circulaire, la prévention et la réduction de la pollution ainsi que la protection et la restauration de la biodiversité et des écosystèmes. Chez Degroof Petercam, nous allons au-delà des objectifs d’ordre environnemental lorsque nous sélectionnons des entreprises, c’est-àdire que nous prenons en compte tous les critères ESG parce que nous estimons que les aspects sociaux et de gouvernance, tels que les droits humains, les conditions de travail, la lutte contre la corruption, doivent aussi être au coeur des sociétés vertueuses, parce que les interconnections entre les grands enjeux sont croissantes et parce que, enfin, de plus en plus d’investisseurs sont attentifs à d’autres critères que ceux qui concernent uniquement l’environnement. Nous estimons donc que les investissements durables font partie d’un tout. Aussi, nous travaillons en amont avec de nombreuses entreprises que nous estimons intéressantes mais qui ne sont pas encore vertueuses et que nous poussons à travailler sur leur transition. Et nous nous assurons qu’elles y travaillent.

Existe-t-il un référentiel, des labels ?

Il n’y a pas de référentiel spécifique. La réglementation européenne SFDR vise à une transparence sur les investissements dits durables et responsables sans nécessairement fournir une seule définition. Il y a également des agences internationales de notations spécialisées dans l’évaluation des performances ESG des entreprises qui attribuent des scores mais, là également, si elles se doivent d’être transparentes sur leur méthodologie, elles peuvent définir elles-mêmes leurs approches et angles d’analyse. Enfin, il y a les labels. Au Luxembourg, il existe le label ESG Lux- FLAG, et d’autres labels plus spécialisés en fonction du sujet (climat, impact, etc.). En Belgique, le label Towards Sustainability est très strict, et probablement l’un des plus poussés en termes d’exigences de critères et d’ambitions climatiques et sociales. D’autres pays encore possèdent des labels aux critères plus ou moins contraignants. L’aspect culturel peut y jouer une certaine influence. Par exemple, en Allemagne, le label FNG est très strict sur la question de l’utilisation de l’énergie nucléaire.

Sur quelle base conseillez-vous vos clients ?

Les modifications apportées à la directive européenne MiFID II nous obligent à demander à nos clients leurs préférences en termes d’investissements. Aussi, nous avons mis en place un questionnaire qui leur permet d’exprimer leur point de vue sur la durabilité. Chez Degroof Petercam, tous nos produits incluent des critères ESG, mais les clients peuvent demander à mettre davantage l’accent sur certaines dimensions de durabilité telles que la santé, le climat ou encore l’éducation. En tant que signataire des Principes pour l’Investissement Responsable (PRI) promus par les Nations Unies, notre société de gestion s’est non seulement engagée à intégrer des critères ESG dans ses analyses et décisions d’investissement, mais aussi à contribuer de manière efficace à une meilleure diffusion des enjeux ESG auprès des organisations dans lesquelles nous investissons. Pour nous, depuis plus de 20 ans, l’investissement durable ne se résume pas à quelques produits labellisés : c’est un engagement ESG, et ce à tous les niveaux de l’entreprise.

Propos recueillis par Isabelle Couset